lundi 10 septembre 2012, par Arnaud Sperat-Czar
Ses soirées thé et fromages sont un « must ». Dominique Ryser, crémier-fromager genevois, adore défricher et découvrir.
Dominique Ryser, jeune quadra, est l’étoile montante des fromagers de Genève. Une espèce à vrai dire en voie de raréfaction : "Il y avait 52 fromagers détaillants en 1982 dans la ville, nous ne sommes plus que 6 ou 7, marchés compris". Et de pointer "le poids croissant de la grande distribution et la progression de la malbouffe".
Epicurien né, tout en rondeurs, ancien cuisinier venu à la fromagerie en 1992 pour prendre le relais de son beau-père (la "fromagerie Bruand" porte toujours le nom de ce dernier), Dominique a craint alors de restreindre son horizon : "Ne me consacrer qu’aux fromages me faisait un peu peur. Mais on ne fait jamais le tour des fromages. C’est tellement riche."
Son échoppe, située dans la Halle marchande de la cité du Lac Léman, regorge de trouvailles qu’il va puiser en Suisse et dans les pays limitrophes, mais aussi dans les îles britanniques ou la péninsule ibérique. Avec une méthode bien rôdée : "Regarder d’où ça vient, par qui c’est fait, comment c’est acheminé..." Avec 300 références en permanence, Dominique aime donner du choix à ses clients : 5 roqueforts différents, par exemple, ou encore une kyrielle de raclettes : en provenance des alpages de Bagnes, Conches, Fey, Nendaz..."Nous avons même une sélection spéciale de raclette qui porte notre nom : elle est fabriquée du côté de Saanen et affinée dans des caves à gruyère du canton de Fribourg."
L’homme est curieux et avide de nouveautés. Aussi, lorsque la propriétaire d’une boutique de thé, Véronique Gallais, est venue lui proposer de réaliser des accords thés-fromages, bien qu’un peu incrédule, il n’a pas longtemps hésité."Elle avait participé à un grand repas gastronomique dont la seule boisson était le thé. L’alliance réalisée avec le fromage avait été l’accord-phare de la soirée. On s’est retrouvé autour d’une table, on a fait des essais, beaucoup goûté et fini par retenir une quinzaine d’accords. C’était il y a cinq ans. Depuis, nous organisons des soirées dégustations pour nos clients. 600 personnes y ont déjà participé. Le nombre de convives est limité à 10".
La jovialité et la prolixité du personnage jouent à merveille pour communiquer ses engouements. Parmi ses accords favoris, "le thé fermenté chinois ("puher") et le vacherin fribourgeois ; le thé noir de Chine avec une raclette ; un thé japonais iodé, salin, avec un vieux gruyère de 24 mois aux flaveurs de caramel...." "On voyage aussi beaucoup au niveau du thé... C’est un monde que je ne connaissais pas, mais où la notion de terroir est aussi très forte, commente-t-il. Un Darjeeling planté à 2 000 mètres aura des flaveurs miellées et florales qui rappellent celles d’un fromage d’alpage."
Plus classiquement, il organise des soirées vins et fromages. On l’écoute avec envie vanter la justesse de l’alliance entre un "Pinot noir, jeune, un peu tendu, avec un Brillat-Savarin", ou du mariage d’un "Chenin blanc de Loire avec un Saint-nectaire." Il sollicite peu les vins rouges : "Leurs tannins s’accommodent généralement mal du sel du fromage".
On peut en découvrir quelques-unes sur son site Internet, aussi pimpant et plein d’autodérision que l’est le personnage.