lundi 11 octobre 2010 , par Florence Boulenger
Avec ses deux kilos en forme de barque et le mât fièrement planté dans sa pâte délicate, le moins que l’on puisse dire est que la Gabarre attire immédiatement l’attention. « C’est un fromage qui permet de raconter une belle histoire, une histoire vraie, et en plus il est bon ! Il a un peu de “ mâche ”, et il donne plus de gras que nos autres fromages de chèvre », détaille Emmanuel Melet (Ferme du Port-Aubry, au Nord-Ouest de la Bourgogne nivernaise, en bord de Loire). Sa nouvelle création porte le nom d’une embarcation traditionnelle à fond plat, autrefois utilisée pour se déplacer d’île en île sur la Loire. Emmanuel puise dans ses souvenirs avec d’autant plus d’affection que son grand-père envisagea un temps, dans les années 1970, d’acheter l’une de ces îles pour y faire pâturer les chèvres de la ferme. « A l’époque, la chèvre était la vache du pauvre, les éleveurs, pour la plupart, ne possédaient pas de terrain, ils emmenaient donc leurs bêtes le long des fossés, sur les rives de la Loire, mais aussi sur les très nombreux îlots que compte le fleuve. Ils les faisaient traverser en barque, en gabarre précisément ! Ils avaient le droit d’usage des îles, puisque les chèvres, de remarquables “ débroussailleuses ”, leur évitaient d’être envahies par les herbes et régulaient tout simplement les crues en se nourrissant. »
Fabriqué au lait cru, comme le reste de la production du Port-Aubry (crottin de Chavignol AOP, Cabri, Cosne du Port-Aubry, Chevr’ail, Tomette, Clochette...), la Gabarre est un fromage lactique dont le moulage demande une grande délicatesse « pour faire tenir l’ensemble ». « Par contre, sans dévoiler mes secrets, je peux vous dire que j’ai de la chance : la Nature se charge de façonner naturellement les rebords du bateau », sourit Emmanuel Melet.
Les 400 chèvres de la Ferme, que viennent admirer quelque 70 000 visiteurs chaque année, sont nourries essentiellement à l’herbe pendant la belle saison. « En hiver, nous accordons une telle importance aux fourrages grossiers que nous faisons du séchage en grange. Et nous dessaisonnons les troupeaux (grâce à la lumière, sans artifice hormonal), de façon à ce que ni la flore de la fromagerie ni le petit-lait ne connaissent de période de “ rupture ” ».
Lait cru
La Gabarre est destinée à être vendue à la coupe. Sur la voile, au verso, on peut lire l’histoire du produit. Le dessin d’une gabarre chargée de chèvres, porté au recto, est particulièrement séduisant. Tous les ingrédients sont réunis pour que la Gabarre prenne le vent... « Bien qu’il soit nouveau, ce n’est pas un fromage moderne, nuance Emmanuel Melet. C’est un produit destiné aux crémiers qui aiment l’Histoire, la mémoire... et bien sûr qui apprécient un peu de fantaisie dans leur étal. » A consulter également : le nouveau site Internet de la Ferme, sur www.ferme-portaubry.fr.
Un produit tout neuf, directement inspiré de l’histoire fromagère des bords de Loire.