lundi 5 mai 2014 , par Arnaud Sperat-Czar, Debora Pereira
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Fabriqué dans le sud du Cotentin par la Fromagerie de Pain d’Avaine, le Crémeux du Mont Saint-Michel s’apparente au chaource, en version normande. Découverte de l’atelier où est fabriqué ce fromage tendre et généreux.
L’un des tout premiers clients de Jean-Charles Rabache fut la Mère Poulard, célèbre pour l’omelette proposée aux pèlerins et touristes du monde entier dans son restaurant-auberge situé au pied du Mont Saint-Michel. C’était en 1998. Il venait de créer à Isigny-le-Buat la Fromagerie de Pain d’Avaine, dans un ancien magasin de meubles, après avoir fait ses classes fromagères chez un producteur fermier de munster. “Le nom du fromage est ainsi venu tout naturellement, raconte-t-il : Crémeux du Mont Saint-Michel. »
Il en fabrique désormais environ 700 par jour, au lait cru, dans cet extrême sud du Cotentin où le bocage résiste bien aux cultures de céréales. Le Mont est situé à une trentaine de kilomètres de la fromagerie, qui s’approvisionne en lait auprès d’un seul éleveur : « Il s’agit d’un fervent défenseur de la vache Normande. Il en élève une cinquantaine, à Montigny, à 7 km d’ici. » Le lait arrive chaque jour dans une boule tractée derrière un véhicule.
Mais le fromage ne s’en contente pas : « Le Crémeux est un double-crème : nous l’enrichissons à la crème, que nous achetons à un autre fermier local », explique Jean-Charles Rabache, âgé de 42 ans. Crayeux et tendre lorsqu’il est jeune, le fromage devient crémeux lorsqu’il est bien affiné. Il appartient à la même famille technologique que le chaource et le neufchâtel.
La fromagerie fonctionne en couple : Caroline, 36 ans, originaire de Picardie, a découvert la fabrication fromagère lorsqu’elle a rencontré Jean-Charles trois ans après son installation. C’est désormais elle, assistée d’une employée, qui procède à la fabrication : moulage, retournement, salage… « Avec toutes ces étapes successives, la fabrication d’un crémeux, explique-t-elle, s’étale sur 4 à 5 jours. La coagulation du lait à elle seule exige une demi-journée. »
Produit-phare de la fromagerie, il représente 80% de sa production. Mais deux produits annexes méritent plus que le détour. La « Vieille Mandière » s’inspire de l’ancien saint-Paulin que fabriquait l’abbaye trappiste de Bricquebec : sa grande particularité est d’être affinée au cidre. La même boisson est utilisée pour le « Camembert au cidre », en étant, cette fois-ci, directement mélangée au lait en début de fabrication. La fromagerie produit également, par intermittence, une tomme lavée au cidre (fabriquée au printemps pour les ventes estivales, et en septembre pour celles de fin d’année) et, plus classiquement, du camembert.Vaste, bien équipée, elle est dotée d’une boutique dans laquelle les consommateurs peuvent venir s’approvisionner en direct. Et découvrir, à travers les baies vitrées, les mystères de l’alchimie fromagère.