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Sur les terres du Pecorino Toscano

vendredi 11 septembre 2009, par Arnaud Sperat-Czar

En Italie, les Pecorini sont très populaires, au point que chaque région possède sa propre déclinaison de ce fromage de brebis. Rencontres en Toscane avec les fabricants du Pecorino Toscano.

Du haut de ses 84 ans, Duilio Fiorini peut regarder avec fierté ce qu’est devenue la petite laiterie, « Il fiorino », créée un demi-siècle plus tôt à Roccalbegna, à une centaine de kilomètres au sud de Sienne, et où s’affairent avec énergie 18 employés. Son arrière grand-père, éleveur de brebis, s’était établi dans la région en 1850, à deux kilomètres d’ici. Son grand-père, né en 1870, partait transhumer dans la province d’Arrezo, à l’est de la Toscane, au cours de l’hiver. « Il a arrêté la transhumance et s’est installé ici, raconte-t-il. Il fabriquait du Pecorino Toscano de manière saisonnière. Des marchands locaux venaient nous l’acheter. »

C’était dans les années 50. Duilio a compris avant d’autres que le commerce entamait une métamorphose provoquée par l’exode rural et l’avènement de la « société de consommation ». « Les consommateurs devenaient de plus en plus urbains, les nouvelles formes de distribution alimentaire attendaient des fromages plus homogènes et réguliers, explique-t-il. Je suis arrivé au bon moment. Les producteurs fermiers commençaient à avoir du mal à vendre leurs fromages, j’ai eu l’idée de collecter le lait. Au départ, les gens ne voulaient pas trop le vendre. En Toscane, chacun transformait son propre lait. Il a fallu les convaincre un par un. Un premier éleveur m’a suivi, il gagnait désormais mieux sa vie en vendant son lait, son exemple a essaimé. »
Créée en 1957, l’entreprise s’agrandit dans les années 60, celles du « miracle italien ». Duilio finit par arrêter d’élever ses propres brebis, puis en 1966, à la suite d’un épisode de brucellose, passe au lait pasteurisé.

« Il a fallu alors travailler sur les ferments, le lait cru, lui, n’avait pas besoin d’être réensemencé. » Le patriarche parle d’une « nette amélioration du goût : avant, on avait des produits très différents les uns des autres, avec beaucoup de défauts, des goûts impurs... » Lorsque le Consortium du Pecorino Toscano sera créé en 1985, l’une de ses premières mesures sera de répertorier les ferments autochtones.

La fromagerie collecte le lait auprès de 42 éleveurs et d’une coopérative dans un rayon de 80 km, « presque uniquement sur la province de Grosseto ainsi que dans une partie du nord du Latium », précise Fabio Flori, chargé du contrôle qualité. Lorsque le lait de brebis vient à se tarir, la fromagerie collecte alors, pendant 5 mois, du lait de vache.

Il Fiorino travaille 70 à 80 quintaux de lait par jour, transformés en Ricotta, Marsolino (de forme triangulaire), Cacciotta mista (lait de vache et brebis) et bien sûr, Pecorino Toscano. Particularité de l’emblème des fromages toscans (le tiers du lait de brebis produit dans toute la province lui est dédié) : le caillé est légèrement pressé à la main, le cahier des charges de l’AOP n’acceptant pas la pression mécanique, réservée au Pecorini génériques. Chez Il Fiorino comme dans les ateliers des 15 autres transformateurs de l’appellation, des mains agiles retournent et pressent les fromages, sans coup férir, selon un tour de main qui ne se maîtrise parfaitement qu’au fil des mois.

Les Pecorini sont très populaires en Italie. Simples et rustiques, d’allure et de goût très proches, ils disposent dans pratiquement chaque région d’Italie d’une déclinaison propre. La Toscane s’est intercalée dans le trio de tête entre le Latium (« Pecorino Romano ») et la Sardaigne (« Fiore Sardo »). Le Pecorino Toscano compte au total 16 transformateurs, 2 affineurs et 1 découpeur. Quelque 1,25 million de fromages de 2 kilos sont produits chaque année. Les derniers producteurs fermiers ont disparu il y a une dizaine d’années. Pourcentage de fabrications au lait cru : « picolissima », très faible, précise Andrea Righini, directeur du Consortium représentant le fromage.

Un petit millier d’éleveurs de brebis fournissent du lait destiné à la fabrication de Pecorino Toscano DOP. La zone d’appellation comprend toute la Toscane ainsi que 11 communes limitrophes du Latium et deux communes d’Ombrie. Une zone très vallonnée, véritable mer de collines, au climat chaud tempéré par les vents d’ouest maritimes. Difficile de croiser un troupeau dans les campagnes, tant la pratique de la stabulation s’est généralisée. « Les troupeaux comptent ici au strict minimum 150 têtes, la plupart exploitent 1 000 à 1 500 brebis », précise-t-on chez le second fabricant de l’appellation, la fromagerie Solp, installée dans les environs de Pienza, qui collecte, elle, chaque année, 8 millions de litres de lait de brebis auprès de 70 élevages et d’une poignée de coopératives.

A l’honneur dans les « gastronomia »

La Solp propose une trentaine de références de fromage de brebis, essentiellement des pâtes pressées non cuites, avec un art consommé de l’affinage : au piment, à la tomate, à la tapenade… Son directeur, Pasquale Putzulu est d’origine sarde. « Les bergers sardes avaient le monopole des brebis dans le sud de l’Italie, raconte-t-il. Quelques-uns sont venus jusqu’ici, dont mon père, qui s’était installé avec un troupeau. » Les brebis sardes ont l’avantage de produire jusqu’à 2 litres de lait par jour contre 1 litre pour les brebis noires « Massese ».

Une très faible part est transformée crue : « peu de demande », explique là encore le responsable de production, Riccardo Pavero. Même constat chez Il Fiorino, où « une très petite part de la production est issue de lait cru et réservée aux affinages longs, d’un an », explique Fabio Flori.

Si la Solp vise essentiellement le marché de la grande distribution, Il Fiorino privilégie le marché des « Gastronomia », ces échoppes-restaurants très populaires en Italie qui proposent charcuteries, vins, fromages, à déguster au bar ou en salle. Exemple qui mérite le détour : l’Enoteca de San Quirico de Orcia, située dans la rue principale du petit village de 2 000 habitants, ramassé autour de l’église au sommet d’une colline, dans le Sud de la Toscane. « Molto, molto boni », ne cesse de susurrer Angelo Zamperini, patron de l’Enoteca, en goûtant le « Poderino » de Luciano Gorellin (appellation Orcia), son ami d’école propriétaire de trois hectares de vignes, qui fait vinifier ses raisins par l’une des stars locales, Casanova di Neri, nom renommé de l’appellation Brunello di Montalcino.

La boutique propose quasi uniquement des vins de la province de Sienne (Brunello di Montalcino, Nobile di Monte Pulciano, Orcia…), un peu de Chianti Classico, quelques vins siciliens et du champagne Krug pour les grandes occasions. Au menu ce jour-là, « saucisson de cerf et assiettes de petits fromages de chèvre très affinés au lait cru. » L’accord préféré du patron : un Nobile di Monte Pulciano (pris chez Poderi Boscarelli ou chez Poliziano), avec des Pecorini di Pienza de 6 mois. « Ces fromages ont un goût très particulier, explique-t-il : les brebis broutent l’herbe Barbecco, qui pousse dans des boutonnières argileuses et donne un goût spécifique au fromage ». Avec des Pecorini plus frais, Angelo préfère le Rosso di Montepulcano ou le Rosso di Montalcino.

Autre bonne adresse à conseiller, en version plus touristique, celle de la Taverna di San Giuseppe, nichée dans une ruelle en pente de la somptueuse ville de Sienne, avec sa cave étrusque, située en contrebas de la salle de restaurant et dont la roche est entaillée de coups de burin millénaires. Des Pecorini de tous âges et tous types d’affinage mûrissent lentement au milieu des caisses de vins...

Ambiance plus féminine et souriante du côté de Pise, chez « Da Alcide », à Venturina, où signora Baldini et ses deux filles, Cristina et Francesca, concoctent une cuisine de saison inventive et colorée. Décoration moderne très inspirée côté restaurant, ambiance tapas côté café avec jambons suspendus au plafond et fréquentation plus populaire. Avec le sourire généreux des trois maîtresses de maison, sans supplément !

Le caillé est légèrement pressé à la main, le cahier des charges de l’AOP n’acceptant pas la pression mécanique, réservée au Pecorini génériques.



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