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Jules Perinetti, la vie rude

lundi 14 juin 2010, par Arnaud Sperat-Czar

Du haut de ses 58 ans et du magnifique village perché de Tralonca, à 10 km de Corte, en plein centre de l’ Ile de beauté, Jules Perinetti se remémore, en contemplant la pente couverte par le maquis, les champs de blés qui ondulaient sous le vent comme la mer, et les rangs de vignes. « C’était il y a une quarantaine d’années, quand j’ai commencé. C’était avant l’exode rural, dit-il sobrement. Aujourd’hui, la terre est sèche, il ne reste plus que du cyste. » Un végétal caractéristique du maquis dont se détournent ses 150 chèvres, lui qui en a eu jusqu’à 350. « Elles n’ont plus rien à manger, on ne fait plus du fromage que tous les deux jours. C’est un métier qui va disparaître », assure-t-il, fataliste.
Il est le dernier berger du village. « Il y a une vingtaine d’années, nous étions encore 7. Lorsque l’un de nous avait un problème, il y avait toujours quelqu’un au village pour traire ses chèvres. Plus personne ne sait le faire. Il faut aller à 40 km d’ici pour trouver un autre troupeau de chèvres. Toutes les familles corses avaient des bergers dans leur famille. Même celles qui comptaient aussi un ministre ! » Fier, le visage encadré par une barbe grise coupée court, il porte beau dans sa tenue de camouflage. Il ponctue ses phrases de sentences, sans élever la voix ni changer de ton. « Avant, avec rien, les bergers faisaient du bon. Maintenant, avec tout, ils ne font rien ». « Avec 2 litres de lait, nous on fait un fromage. Avec les chèvres du continent, telles qu’elles sont nourries et élevées, il faudrait 5 litres. »
Il a commencé avec deux chèvres. « J’ai appris à fabriquer en observant mes proches, ma mère. Ma famille ne voulait pas que je devienne berger. Quand on est jeune, on a la tête vide, on n’écoute pas. Tous les jours, je remontais le lait en haut du village et j’allais chercher jusqu’à 11 heures du soir les chèvres parties vers les sommets, pour les relâcher vers 4 heures du matin. Les chèvres, elles vous font courir. Elles font tomber les murs, les écorces... Quelquefois, elles sautent par-dessus les barbelés et n’en sortent pas indemnes. »
« La Corse comptait 450 000 chèvres après la guerre, assure-t-il. Il en reste 30 000 à 40 000 aujourd’hui. » Ce matin-là ; il a recueilli un chevreau né la veille. Il le tient dans ses bras, puis comme s’il s’était laissé allé à trop de compassion, par les pattes arrière. « Celui-là, on ne le laissera pas aux renards ».

Le chevrier garde la mémoire d’un autre monde en plein centre de l’Ile de beauté.

Du haut de ses 58 ans et du magnifique village perché de Tralonca, à 10 km de Corte, en plein centre de l’ Ile de beauté, Jules Perinetti se remémore, en contemplant la pente couverte par le maquis, les champs de blés qui ondulaient sous le vent comme la mer, et les rangs de vignes. « C’était il y a une quarantaine d’années, quand j’ai commencé. C’était avant l’exode rural, dit-il sobrement. Aujourd’hui, la terre est sèche, il ne reste plus que du cyste. » Un végétal caractéristique du maquis dont se détournent ses 150 chèvres, lui qui en a eu jusqu’à 350. « Elles n’ont plus rien à manger, on ne fait plus du fromage que tous les deux jours. C’est un métier qui va disparaître », assure-t-il, fataliste.

La tête vide

Il est le dernier berger du village. « Il y a une vingtaine d’années, nous étions encore 7. Lorsque l’un de nous avait un problème, il y avait toujours quelqu’un au village pour traire ses chèvres. Plus personne ne sait le faire. Il faut aller à 40 km d’ici pour trouver un autre troupeau de chèvres. Toutes les familles corses avaient des bergers dans leur famille. Même celles qui comptaient aussi un ministre ! » Fier, le visage encadré par une barbe grise coupée court, il porte beau dans sa tenue de camouflage. Il ponctue ses phrases de sentences, sans élever la voix ni changer de ton. « Avant, avec rien, les bergers faisaient du bon. Maintenant, avec tout, ils ne font rien ». « Avec 2 litres de lait, nous on fait un fromage. Avec les chèvres du continent, telles qu’elles sont nourries et élevées, il faudrait 5 litres. »

Il a commencé avec deux chèvres. « J’ai appris à fabriquer en observant mes proches, ma mère. Ma famille ne voulait pas que je devienne berger. Quand on est jeune, on a la tête vide, on n’écoute pas. Tous les jours, je remontais le lait en haut du village et j’allais chercher jusqu’à 11 heures du soir les chèvres parties vers les sommets, pour les relâcher vers 4 heures du matin. Les chèvres, elles vous font courir. Elles font tomber les murs, les écorces... Quelquefois, elles sautent par-dessus les barbelés et n’en sortent pas indemnes. »

« La Corse comptait 450 000 chèvres après la guerre, assure-t-il. Il en reste 30 000 à 40 000 aujourd’hui. » Ce matin-là ; il a recueilli un chevreau né la veille. Il le tient dans ses bras, puis comme s’il s’était laissé allé à trop de compassion, par les pattes arrière. « Celui-là, on ne le laissera pas aux renards ».

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